Le groupe hongrois MOL est sur le point de supplanter la Russie dans la course au pétrole des Balkans
Lors de sa conférence de presse de fin d'année, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a souligné une opportunité économique unique : le groupe russe Lukoil met en vente l'une des plus importantes raffineries de pétrole des Balkans, Burgas Neftochim. Le groupe hongrois MOL participe également à l'appel d'offres et, en tant que seul soumissionnaire de l'UE, le Premier ministre estime qu'il a de bonnes chances de réussir. Cette transaction pourrait constituer une étape importante pour la Hongrie, non seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan géopolitique.
D’après TélexBurgas Neftochim est l'une des raffineries de pétrole les plus grandes et les plus modernes des Balkans, capable de traiter sept millions de tonnes de pétrole par an. La raffinerie utilise principalement du pétrole de la mer Noire, transporté par pétrolier, et joue un rôle stratégique dans l'approvisionnement énergétique de la région. Lukoil a acheté l'usine en 1999 et a depuis procédé à un certain nombre d'améliorations, mais la position de l'entreprise en Bulgarie a décliné ces dernières années.
Si MOL réussit à acquérir la raffinerie, elle pourrait non seulement étendre ses intérêts en Hongrie, en Slovaquie et en Croatie, mais aussi devenir un acteur clé de l'approvisionnement énergétique des Balkans. Cette opération donnerait à l'entreprise hongroise un avantage stratégique sur les marchés régionaux.
Concurrence internationale et défis politiques
Les chances de MOL sont renforcées par le fait que la société hongroise est la seule entreprise européenne à se porter candidate pour la raffinerie, mais la concurrence internationale est forte : le consortium britannique-catalan Oryx Global et le londonien DL Hudson étaient jusqu'à présent considérés comme les favoris par la presse. Bien que Lukoil n'ait pas officiellement négocié avec eux, les médias bulgares ont rapporté que des investisseurs américains et azerbaïdjanais avaient également manifesté leur intérêt pour l'accord. La course n'est pas seulement économique mais aussi politique, car le succès de l'accord dépend de la décision des autorités bulgares et de la réduction de l'influence économique russe dans la région.
La Bulgarie a une longue histoire de crises politiques intérieures. Outre l'instabilité parlementaire et les changements fréquents de gouvernement, la situation économique et énergétique du pays est incertaine. Actuellement, les personnalités politiques les plus en vue sont le président de la République, Roumen Radev, et le chef de la coalition GERB-SDS, Boïko Borissov. Les deux hommes politiques ont des positions différentes : alors que Radev est plutôt pro-russe, Borissov est considéré comme un partisan de l'intégration occidentale.
Cette dichotomie politique est également évidente dans le cas de Burgas Neftochim. Le soutien de Viktor Orbán suggère que la Hongrie considère l'acquisition de la raffinerie bulgare comme une opportunité sérieuse, mais la décision des autorités locales d'approuver l'opération n'est pas dénuée de considérations politiques.
Lukoil en Bulgarie et de nouvelles opportunités pour MOL
Le groupe russe Lukoil domine le marché bulgare depuis des décennies, notamment grâce à des contrats de concession portuaire à long terme pour le transport de pétrole en mer Noire. Ces dernières années, les autorités bulgares ont toutefois resserré leur emprise sur la compagnie russe. Lukoil a été frappée d'importantes amendes fiscales et les mesures prises par le gouvernement bulgare montrent clairement qu'il tente d'évincer la compagnie du marché.
L'acquisition de Burgas Neftochim pourrait ouvrir de nouvelles perspectives d'approvisionnement pour MOL. Posséder une infrastructure portuaire constituerait un avantage stratégique majeur, car cela permettrait à l'entreprise hongroise de diversifier ses voies d'approvisionnement en pétrole. Bien que le transport par le Bosphore soit difficile, la raffinerie serait en mesure de traiter une part importante du pétrole kazakh, saoudien ou irakien qui transite par la mer Noire.
Certains experts estiment qu'à long terme, il serait intéressant d'envisager la construction d'un oléoduc bulgaro-serbo-hongrois, qui offrirait une alternative de transport plus stable. Pour MOL, une telle démarche permettrait non seulement d'améliorer la sécurité d'approvisionnement, mais aussi de développer davantage le marché dans les Balkans et en Europe centrale.
Mettre fin à la domination locale de Lukoil pourrait également s'avérer important d'un point de vue géopolitique. La réduction de la présence économique russe en Bulgarie pourrait conduire à une plus grande stabilité dans la région, tandis que l'implication de MOL pourrait renforcer les intérêts de l'UE. Bien que l'opinion publique bulgare soit mitigée quant à la perception de l'implication politique hongroise, l'expérience européenne de MOL pourrait lui permettre d'être accueilli plus favorablement qu'un autre intérêt russe ou étranger.
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